La gestion d'une cave à vin.

Travail et responsabilités du sommelier en milieu de restauration

Compte rendu d'une conférence donnée le 13 février 2012 aux étudiants de
l'Institut de Tourisme et d'Hôtellerie du Québec (ITHQ) à Montréal.

        

1             LE RÔLE ET LES RESPONSABILITÉS DU SOMMELIER

1.1          En établissement

Le sommelier est beaucoup plus qu’un serveur de vin. Il est responsable de l’espace vin, que ce soit un petit cellier ou une grande cave à vin. Il doit s’assurer de la rotation des stocks, faire la carte des vins, suggérer des accords mets et vins en collaboration avec le chef et il doit tenir informés les autres membres du personnel. Les sommeliers sont les spécialistes les plus connaisseurs de l’industrie du vin et les autres membres du personnel comptent sur eux pour les assister auprès de la clientèle et pour le service du vin. Il est la personne ressource en matière de vin.

Les ventes et la rentabilité d’un établissement sont sa raison d’être et un sommelier compétent se doit de faire hausser le chiffre d’affaires d’un restaurant en s'appuyant sur son savoir et ses expériences.

En termes de gestion et de savoir, le sommelier devra établir des objectifs et des politiques d’entreprise en matière de vin et de conservation et stockage de celui-ci.

Des produits de qualité

En restauration, il n’y a pas de compromis à faire sur la qualité. Que ce soit un restaurant branché, huppé, ou le petit restaurant de quartier, les clients s’attendent à de la qualité.

Même les petits vins doivent être intéressants. Ils manqueront parfois de finesse, ils ne seront pas très évolués, mais ils doivent toujours rester agréables à boire.

Des produits originaux, à faire découvrir

Le sommelier doit toujours rester à l’affut des tendances et des nouveaux produits. Parfois il doit faire redécouvrir des produits à ses clients.

Les vins peuvent toujours être regroupés. Que ce soit par cépage, par région, par méthode de vinification: les vins sont tous différents, mais appartiennent à des familles de styles. Le sommelier doit connaître ses stocks de A à Z pour être en mesure de bien guider et répondre à la demande de ses clients. Si le client sait déjà ce qu’il veut, le rôle du sommelier consistera alors à lui suggérer, s’il est réceptif, un vin qu’il jugera supérieur ou quelque peu différent, tout en restant dans la même gamme, afin d’offrir à son client une nouvelle expérience de dégustation. Il pourra par la même occasion pousser la vente de produits plus lucratifs.

Le travail du sommelier implique un travail de recherche constant. Habituellement, les représentants des différentes agences défileront à son établissement pour lui faire découvrir différents produits. Mais il ne devra pas s’en tenir qu’à ça. Il devra toujours être à la recherche de nouveaux produits, de nouvelles découvertes et, pour y parvenir, il devra lire les revues spécialisées et assister aux différents salons et dégustations.

Du personnel compétent

Il est important d’assurer une présence auprès des clients et tout le personnel de la salle devrait y être sensibilisé. L’alcool ne peut être vendu sous pression. Les lois et la morale nous interdisent de faire des promotions et de pousser les ventes dans ce sens. Les sommeliers et les serveurs ne peuvent que suggérer, offrir et être à l’écoute des besoins de leurs clients.

Par contre, si la quantité est difficile à promouvoir, il en va tout autrement de la qualité. Il est tout à fait pertinent d’inciter les consommateurs à acheter un vin de gamme supérieure et le meilleur moyen de le faire est de former le personnel. Si vos employés savent quels sont les coûts nécessaires à l’élaboration d’un vin de qualité et s’ils peuvent expliquer la provenance et les caractères du produit, ils seront probablement plus en mesure d’inciter le consommateur à acheter une meilleure bouteille.

Les clients néophytes ont parfois de la difficulté à différencier un vin extraordinaire d’un autre plus ou moins raffiné. Mais ils n’auront aucune difficulté à différencier un bon service d’un mauvais.

Une carte des vins bien conçue et bien présentée

Plus que pour tout autre produit de consommation, l’appréciation d’un vin est tributaire de l’environnement et du contexte. Par exemple, nous avons tous apprécié un vin lors d’un voyage dans une région particulière. Mais lorsque nous rapportons ce même vin, que nous le buvons au retour de notre voyage dans un environnement différent avec d’autres personnes, ce vin qui nous avait semblé extraordinaire peut s’avérer finalement bien ordinaire. Si le personnel d’un restaurant réussit à faire vivre une expérience unique à ses clients, il va s’assurer que celle-ci restera gravée dans leurs mémoires.

Le sommelier et le personnel d’un établissement font partie de l’expérience qu’un client vient vivre et son appréciation des produits qu’il déguste sera proportionnelle à l’ambiance et l’atmosphère de l’endroit où il aura dégusté son vin.

2    CARTE DES VINS

2.1          Adapter sa carte au menu et à la clientèle

Une bonne carte des vins doit être ciblée, que ce soit pour un grand restaurant, un restaurant à thème ou un bistrot. Vous devez tenir compte des préférences du marché local, des tendances actuelles, de ce qu’offrent vos concurrents et où vous êtes situé. Vous devez décider de la longueur et du style de votre carte, que ce soit une carte des vins élaborée, qui nécessite d’avoir une cave bien fournie avec des vins de garde ou une courte liste de vins de consommation, qui change constamment ou non et qui dégage des mouvements de trésorerie.

2.2          Déterminer une gamme de prix cohérente avec l’établissement

Les gens qui se présentent dans un restaurant son déjà convaincus. Ils vont manger et ils ont possiblement l’idée de boire. Inutile de vouloir les convaincre de faire autrement. Ils ont réfléchi, la plupart du temps, au montant maximum de leur éventuelle facture et ils ont choisi l’établissement en fonction de sa réputation, son marketing et sa politique de prix.

Il faudra s’assurer de répondre à leurs besoins et leurs attentes. Le prix est l’un des principaux facteurs qui permettront au restaurateur de satisfaire le client ou de le décevoir… et même de perdre des ventes si sa politique de prix ne correspond pas aux attentes des clients.

Deux types de marges bien distincts peuvent être utilisés pour déterminer le prix de vente des vins : la marge fixe et la marge variable.

a)            La marge fixe
Comme son nom l’indique, la marge fixe suggère l’ajout d’un certain montant fixe au prix de revient de la bouteille hors taxes (HT), auquel seront ensuite ajoutées les taxes pour déterminer le prix de vente de la bouteille. On l’appelle parfois «frais de débouchonnage».

Pour calculer une marge fixe :

  • Prix de revient de la bouteille HT
  • + Marge fixe de 20 $ (par exemple)
    + Taxes
    = Prix de vente de la bouteille

Ce type de marge garantit un bénéfice fixe par bouteille, pour chaque bouteille de vin vendue.

Toutefois, cette méthode présente l'inconvénient de rendre les vins bas de gamme souvent beaucoup trop chers pour le client. Par exemple, un Mouton Cadet à 13,95 $ (TTC) de la SAQ devra se vendre 36,95 $ (13,.95 $ + 20 $ + taxes), soit 265 % le prix de la SAQ.

À l’opposé, on se rend vite à l’évidence que les bouteilles deviennent de plus en plus avantageuses pour le client et désavantageuses pour le restaurateur, au fur et à mesure que vous montez dans les prix de la carte des vins. Par exemple, un Tignanello à 99,75 $ (TTC) de la SAQ se vendra 122,75 $. Soit 123 % du prix de la SAQ.

Le montant de la marge fixe à appliquer varie d’un établissement à un autre, mais il doit somme toute demeurer concurrentiel.

Une autre façon de calculer le montant de la marge fixe consiste à additionner tous les frais relatifs au service du vin (construction de cave, maintenance, salaires du sommelier, etc.) et de diviser de montant par le nombre de bouteilles que vous prévoyez vendre durant une même période, en n’oubliant pas d’y ajouter une marge de profit.

b)            La marge variable
Ici, le restaurateur optera pour une marge variable en pourcentage et le prix de vente sera fixé de la même manière pour tous les vins, c'est-à-dire qu’une marge à taux fixe sera appliquée sur toute la gamme.

Pour calculer une marge variable:

  • Prix de revient de la bouteille HT
    x Pourcentage établi
    + Taxes
    = Prix de vente de la bouteille

Le pourcentage établi à appliquer varie d’un établissement à un autre, mais il doit être concurrentiel.  Une façon de calculer le pourcentage de la marge variable consiste à additionner tous les frais relatifs au service du vin (construction de cave, maintenance, salaires du sommelier, etc.) et de diviser le montant par le montant des ventes que vous prévoyez atteindre durant une même période, en n’oubliant pas d’y ajouter une marge de profit.

c)             Combinaison taux fixe et variable
Tous les restaurateurs utilisent une des méthodes à taux fixe ou variable ou une combinaison des deux pour déterminer leurs marges. Par exemple, 5 $ fixe par bouteille majoré d’un taux variable de 170 %.

Pour calculer une combinaison:

  • Prix de revient de la bouteille HT + taux fixe de 5 $
    x pourcentage établi
    + Taxes
    = Prix de vente de la bouteille

Dans les deux exemples précédents : le Mouton Cadet se vendrait 33,49 $ alors que le Tignanello se vendrait 179,35 $.

Quelle que soit la méthode que vous décidez d’utiliser, assurez-vous qu’en définitive, le montant de bénéfice corresponde au budget de votre restaurant.

2.3          S’assurer d’un approvisionnement suffisant et régulier

La carte des vins doit toujours refléter ce que la cave contient.

Si votre carte des vins est pré-imprimée, il faut vous assurer que votre réapprovisionnement en produits soit possible. La plupart des produits réguliers de la SAQ sont assurés sur une base annuelle. Seuls les millésimes changeront. Il serait donc préférable de ne pas faire imprimer le millésime sur votre carte des vins. Les agences pourront vous informer de la disponibilité future des produits.

La plupart des grands établissements disposent d’une carte avec des pages amovibles qui seront révisées de temps à autre. Cette flexibilité permet d’offrir des vins plus rares, mais qui ne sont pas disponibles en tout temps. Ce type de carte permet également d’inscrire les millésimes sur la carte puisqu’elle sera révisée régulièrement.

2.4          Être inventif et informatif, autant pour le personnel que la clientèle

Le sommelier doit connaître ses produits et partager son savoir avec les autres membres du personnel et sa clientèle. Si le client est réceptif, il appréciera connaître une courte anecdote sur le vin qu’il propose à ses clients. Il aimera également que vous preniez le temps de lui expliquer ce qu’il boit. C’est, pour le client, une façon d’associer mentalement un vin à une situation; il pourra plus facilement se souvenir de son expérience gustative et sensorielle, donc, se souvenir de vous ou de votre établissement.

3             STOCKAGE ET CONSERVATION DES VINS

3.1          Facteurs intervenant dans la conservation d’un vin

La conservation d'un vin dépend principalement des facteurs suivants :
                -sa couleur et son type : blanc, rouge, sec, moelleux, etc.
                -son origine : région septentrionale ou méridionale, vignoble de plaine ou d'altitude, etc.;
                -sa constitution (alcool, tanin, acidité...), qui dépend elle-même de la nature du sol, du cépage et des conditions climatiques, variables selon les millésimes;
                -la vinification;
                -les conditions de stockage.

Il ne faut jamais perdre de vue que le vin est une matière vivante et qu'il évolue. Sa jeunesse se traduit parfois par une certaine astringence pour les vins rouges et une pointe d'acidité pour les blancs. Le vin suit une courbe de maturité gustative et les chances demeurent fortes que la courbe de la valeur monétaire d’un flacon suive la même évolution.

a)            Combien de temps peut-on conserver un vin?

On conserve un vin le moins longtemps possible, dès qu’il est prêt à boire, parce que les vins coûtent cher et les investissements qu’ils représentent doivent être rentabilisés.

Certains vins sont prêts à la consommation quelques mois après la cueillette du raisin : les vins de primeur, par exemple, commercialisés dès le mois de novembre qui suit la récolte voire dès la mi-octobre pour les vins de pays primeurs. D'autres, au contraire, sont agressifs, astringents et instables. Ils doivent vieillir afin de «s'assagir» avant d'atteindre la qualité première d'un vin : l'équilibre entre ses différents composants.

La plupart des vins blancs secs et frais (bien pourvus en acidité, de type Muscadet, Sancerre...), les vins rosés et les vins rouges légers, en particulier les vins nouveaux ou «primeur» doivent être bus jeunes. Mais attention aux exceptions, parmi lesquelles il faut citer certains Chablis. Les grands vins blancs de la Côte de Beaune, en Bourgogne, mais surtout les vins mœlleux ou liquoreux du Bordelais, du Val de Loire et d'Alsace ont souvent une excellente aptitude au vieillissement.

Quant aux vins rouges, ceux issus exclusivement ou essentiellement des cépages Syrah, Cabernet Sauvignon et Mourvèdre, demandent un vieillissement plus ou moins long pour se livrer pleinement, surtout s'ils ont été produits par macération longue (premiers crus du Bordelais, Côte Rôtie, Bandol...). Ce vieillissement s'effectue en bouteilles, mais il est souvent précédé par un séjour en fût de chêne. Deux éléments importants interviennent au cours de ce vieillissement : le bois et le liège.

b)            Influence du bois

Jusqu’à récemment, nous pouvions dire que les vins élevés en barriques de chêne avaient un plus grand potentiel de garde que les vins qui n’avaient passé aucun, ou peu de temps en barrique. La barrique permettant de laisser passer une certaine quantité d’oxygène permet au vin de développer ses qualités organoleptiques et de s’oxyder légèrement, ce qui favorise sa conservation éventuelle. Cette notion n’est plus nécessairement vraie…

Des travaux de la station œnologique de Bordeaux ont démontré que «la bonne oxydation ménagée de l'élevage des vins en barriques» peut être assez bien reproduite lors de l'élevage en cuves.

c)            Influence du liège

Le liège est le matériau idéal de bouchage en raison de différentes caractéristiques :

-          -Il est souple pour pénétrer dans le goulot;

-          -Il est élastique, ce qui lui permet de reprendre sa forme et d'obturer parfaitement;

-          -Il laisse passer une quantité d’air suffisante pour permettre aux vins de vieillir;

-          -Il est neutre et imputrescible.

Malgré toutes ces qualités, on rencontre parfois des bouteilles couleuses. Plusieurs raisons expliquent cet état de fait : le bouchage mécanique, la pression dans la bouteille, mais aussi la qualité du liège. En effet, il existe des lièges de différentes qualités. À partir des meilleurs sont fabriqués des bouchons longs, qui font généralement 53 mm. Ces bouchons, très recherchés et très chers, sont utilisés pour les vins de garde. Pour les vins de table et les vins à boire jeunes sont généralement utilisés des bouchons de qualité moindre. Il existe évidemment des qualités intermédiaires.

Souvent : vins de garde = grands bouchons ; vins à boire jeunes = petits bouchons.

Dans une cave à vin, nous devons garder les bouteilles à l’horizontale pour garder un bouchon de liège humide. Un bouchon peut prendre plusieurs mois avant de dessécher et perdre ses qualités de conservation, mais lorsqu’il est séché, le processus est irréversible et le bouchon de liège permettra à trop d’air d’entrer dans la bouteille, causant ainsi une oxydation prématurée du vin.

Attention aux vins (ou alcools) qui contiennent un taux d’alcool trop élevé. Un taux d’alcool dépassant 20 % risque d’endommager le bouchon. Il vaut alors mieux les garder debout.

À noter que dans des conditions idéales de stockage, les meilleurs bouchons ne durent guère qu'une vingtaine d'années. Pour éviter toute mauvaise surprise, il vaut mieux les remplacer tous les 15 ans, par des bouchons d'aussi bonne qualité. Mais il s'agit d'une opération très délicate, qui doit être confiée à un spécialiste. Le maître de chai de certains grands châteaux du Bordelais se déplace ainsi chez certains collectionneurs de vieux millésimes pour effectuer ce changement. Il se déplace dans tous les pays du monde.

- Bouchons synthétiques ou capsules

Les bouchons de liège présentent deux désavantages : le risque de contamination par le TCA et le risque de couleuses (bouteilles dont le bouchon fuit). Les bouchons synthétiques évitent ces problèmes en respectant la perméabilité à l’oxygène qui laisse vieillir le vin.

Il est cependant inutile, mais sans conséquence, de laisser les bouteilles qui ont des bouchons synthétiques ou des capsules à l’horizontale. Puisque ces bouchons n’ont pas besoin d’être humides pour conserver leurs qualités d’étanchéité, les bouteilles peuvent être entreposées à la verticale.

d)
            Influence de la vinification sur la conservation

Certains vins sont obtenus par vinifications courtes : ils sont souples, bons à boire assez rapidement. D'autres sont élaborés par vinifications longues : plus charpentés, ils demandent un séjour en cave plus prolongé.

La vinification a incontestablement une influence sur la conservation des vins : utilisation ou non de la rafle, durée de macération, température de vinification, etc. Lorsqu'un restaurateur achète un vin, il serait souhaitable qu'il se renseigne sur la façon dont le vin a été élaboré et l'achète en fonction de l'utilisation souhaitée : à consommer rapidement ou à conserver.

3.2          Millésimes

a)
            Millésimes et conservation

Dans les grands millésimes, les vins possèdent généralement une bonne, voire une excellente aptitude au vieillissement. Alors que les vins de millésimes réputés moyens ou petits doivent se boire plus rapidement.

Gérer une cave à vin implique également la gestion des millésimes. D’abord, il ne faut pas généraliser; il importe de toujours s’informer. Même dans un millésime moyen, certaines régions auront mieux réussi. Chaque millésime aura également son apogée… un meilleur temps pour être consommé. Cinq ans après sa vinification, il vaut mieux boire un vin de millésime moyen qui est à son apogée que de boire un vin d’un excellent millésime encore trop jeune aux tannins durs et aux arômes fermés.

b)            Existe-t-il de mauvais millésimes?

Dans les vieux pays où les règles sont règlementées, la qualité des raisins dépend du climat. Mais il n'existe plus de véritables mauvais millésimes. Par contre,  -il y en existe d'exceptionnels. Grâce aux progrès technologiques, l’œnologie a réussi à maitriser la vinification et à mieux corriger les problèmes causés par le climat.

Dans le nouveau monde, l’œnologie est également présente pour corriger les problèmes. Mais puisque les règlementations sont moins sévères que dans les vieux pays, il est plus facile de contrôler les facteurs climatiques, avec l’arrosage et le goute à gouttes, entre-autre. L’effet de millésime est pratiquement inexistant.


c)
            Comment apprécier la valeur d’un millésime?

Plusieurs organismes, chroniqueurs et spécialistes publient des cartes de millésimes. Il est facile d’en trouver, mais il faut toujours tenter de trouver des cartes produites par des entités locales et spécialisées sur des régions délimitées.

La plupart des châteaux et des grands vignobles publient également des notes de dégustation et des commentaires relatifs aux millésimes. Même si ces commentaires sont partisans et souvent motivés par des raisons promotionnelles, ils peuvent fournir des indications sur le potentiel de garde d’un vin.

3.3          Conditions de stockage

Les comptables vous le diront, les stocks de vins engloutissent une grande partie du budget d’immobilisation et d’inventaire d’un restaurant. Nous devons examiner deux éléments différents: l’actif à long terme et l’actif à court terme.

Le vin est une matière vivante. Il incombe au sommelier de protéger l’investissement consacré aux stocks de vin. Dans certains cas, certains vins deviendront même des investissements à long terme. Mais ils doivent être conservés dans les meilleures conditions pour pouvoir se conserver… et possiblement se bonifier.

a)            De l’amphore à la bouteille

La fonction première du contenant, pour un liquide, est de pouvoir le transporter. Si les vins ne sortaient jamais de leurs cuves de vinification, il faudrait se rendre aux vignobles pour en soutirer et en boire un verre.

Les générations précédentes ont expérimenté divers contenants, de l’amphore jusqu’à la bouteille, pour transporter et distribuer commercialement le vin. Des «Wine in a box» ou viniers ont récemment été introduits sur le marché, mais c’est la bouteille qui semble le mieux favoriser le transport et la conservation du vin.

La bouteille par elle-même n’offre pas les conditions optimales de conservation. Il faut trouver un environnement propice à la conservation et au vieillissement du vin si on désire préserver son investissement.

b)           L’espace vin : Cellier ou Cave à vin

La cave à vin n’existe plus, ou rarement comme nous la connaissions il y a 50 ou 60 ans. Même dans les grandes villes de France comme Paris, les vieilles caves sont rares, car elles ont souffert d’un manque d’entretien, ou elles ne répondent plus aux critères de conservation en raison de nouvelles normes de construction et caractéristiques déficientes comme la vibration causée par le métro, entre autres.

Un espace vin englobe quatre types d’unité de conservation : (www.maitredecave.ca/choix.htm)
                               -Le refroidisseur à vin
                               -Le cellier de consommation
                               -Le cellier de garde
                               -La cave à vin (naturelle ou artificielle)

c)            Caractéristiques d’une bonne cave

La construction d’une cave à vins doit remplir des conditions essentielles à la bonne conservation du vin:
                                               -Lumière
                                               -Vibrations
                                               -Température
                                               -Humidité
                                               -Odeurs

Pour plus de détails, vous pouvez consulter la page www.maitredecave.ca/commentconst.htm.

d)            Agencement de la cave

Il existe principalement deux méthodes pour organiser physiquement une cave à vin. La méthode européenne demande de placer les bouteilles par région alors que la méthode américaine demande de placer les bouteilles par cépage.

 -Livre de cave
Une bonne gestion de cave à vin débute par un bon livre de cave. Il doit être clair, concis et à jour. Le livre de cave est l’assistant du sommelier qui doit constamment s’y référer.
  Le livre de cave permet au sommelier de se repérer rapidement, mais il permettra également aux autres membres du personnel de retrouver aisément un produit en l’absence du sommelier.

 -Logiciel de gestion de cave
De nombreux logiciels de gestion de cave abondent sur le marché. Ils peuvent avantageusement remplacer le livre de cave dans la mesure où le sommelier et les autres membres du personnel maitrisent parfaitement cet outil. Dans certains cas, il est plus facile d’utiliser des formulaires informatisés plus simples, comme Excel ou d’autres bases de données.

 -Fiches techniques et gustatives
Chacun des produits en cave devrait normalement être accompagné d’une fiche technique permettant d’y retrouver les informations qui n’apparaissent pas sur la carte des vins. Il s’agit généralement des cépages, de la méthode de vinification et de notes de dégustation. Même si le sommelier connait déjà ses informations, il permet à son personnel de s’y référer lorsque les clients désirent en savoir un peu plus.

e)            Retour et garanties de la SAQ

Au Québec, la SAQ assume la responsabilité de la qualité des vins qu’elle vend aux particuliers et aux commerçants.

Sur son site SAQ.com, on peut lire :«La politique de remboursement de la Société des alcools du Québec vous permet d’échanger un produit défectueux ou d’obtenir un remboursement, et ce, à la succursale de votre choix... Seule condition : il faut retourner la bouteille remplie aux trois quarts et elle doit avoir été achetée moins d’un an auparavant.»

Dans le cas d’un produit défectueux, la présentation de la facture est facultative pour obtenir un remboursement ou un échange.

Cependant, cette politique comporte une exception qui n’est pas annoncée sur le site de la SAQ même si elle est officielle : le retour des produits haut de gamme (vieux millésimes, courrier vinicole) sont acceptés même si la période d’achat remonte à plus d’une année, mais étant donné le caractère particulier de ces produits, ils ne sont pas remboursés ou échangés de façon systématique. Une analyse plus approfondie de la réclamation peut être requise, à cette étape, par une personne compétente ou le service gestion de la qualité de la SAQ.

4             VINS ET FISCALITÉ

La relation entre les ventes, le coût des ventes, la valeur des stocks détenus, le taux de roulement des stocks et la moyenne de la marge bénéficiaire aidera dans tous les cas à révéler ce qui est fondamentalement vrai à propos de toute activité commerciale : la seule entreprise qui en vaille la peine est l’entreprise rentable. Des indicateurs primordiaux vous aideront à connaître votre position tout au long de l’exercice financier et, surtout, vous indiqueront clairement si vous déviez de votre objectif de rentabilité.

 Vous devez savoir comment effectuer l’analyse des coûts et comment calculer vos prix de vente pour intégrer le bénéfice nécessaire à l’entreprise. En général, si un vin est plutôt cher, la marge sera moins élevée, et même si vous recevez moins de pourcentage, vous encaisserez souvent une somme plus importante que sur les vins moins chers; toutefois, il faut toujours considérer le roulement dans l’équation. Un vin qui ne roule pas, qui se vend rarement, n’est pas un vin rentable même si le montant de profit individuel est intéressant.

 4.1         Établir des statistiques de vente et d’achat

Les restaurateurs qui réussissent bien sont toujours de bons administrateurs. Ils connaissent parfaitement leur chiffre d’affaire et conservent des statistiques de vente sur une base mensuelle et pratiquement hebdomadaire. Ils anticipent toujours leurs ventes et comparent toujours les résultats d’une année à l’autre en tentant de comprendre et d’expliquer les écarts, s’il y en a.

Il faut s’organiser et établir des systèmes pour bien garder l’historique de nos ventes. Que ce soit sur Excel, sur une base de données ou sur un logicies spécialisé, il faut que le sommelier maitrise bien son support de données. Il pourra comparer et anticiper les tendances s’il suit assidument ses statistiques.

Parmi les éléments à anticiper, citons évidemment la gestion du personnel, mais un des éléments qui s’avèrent également essentiels est la gestion des stocks. Dans le cas d’un sommelier, c’est particulièrement la gestion des stocks de la cave à vin qui nous intéresse.

Deux types de gestion de stocks sont à considérer en sommellerie: la gestion des vins de garde et la gestion des vins de consommation courante.

a)            -Taux de rendement

Le taux de rendement espéré est le pourcentage que les actionnaires espèrent recevoir sur leur investissement, alors que le taux de rendement réel est le profit annuel net qu’ils obtiennent divisé par l’investissement initial.

Taux de rendement = profit net annuel  ÷ investissement

Le taux de rendement espéré devrait toujours être gardé en tête et tous les calculs prévisionnels doivent en tenir compte. Le taux de rendement est établi par le marché. Un taux trop bas fait fuir les investisseurs alors qu’un taux trop élevé provoque une compétition excessive. Le marché a tendance à s’équilibrer de par lui-même.

-Vins de garde

Les vins de garde seront considérés comme une immobilisation dans les registres comptables et au bilan de l’entreprise. Cela signifie que les vins achetés pour la garde ne constituent pas une dépense d’opération, mais plutôt un investissement à long terme, tout comme les chaises, les tables et les autres actifs à long terme du restaurant.

Pour justifier un investissement en vins de garde, le sommelier doit être convaincu que l’investissement sera rentable. Il doit s’assurer que les vins prendront de la valeur et que le coût d’acquisition des vins jeunes s’avèrera significativement moins élevé que l’achat du même vin dans plusieurs années. Pour être rentable, l’investissement en vin de garde doit répondre à certains critères :

    -Les conditions de garde doivent être parfaites et sans risques.
    -La certitude de pouvoir vendre le produit, une fois vieilli, doit être absolue.
    -Les fonds requis pour l’investissement doivent être disponibles.
    -Le taux de rendement espéré doit être conforme aux politiques de l’entreprise.

Si les actionnaires de l’entreprise espèrent obtenir un taux de rendement de 10 % annuel sur leur investissement, le sommelier doit s’assurer que ce taux sera respecté. Par exemple, si vous investissez 100 $ sur un flacon, les propriétaires s’attendront à ce que cette bouteille puisse se vendre :
                110 $ la première année, soit 100 $ + 10 % = 10 $ de profit.
                121 $ la deuxième année, soit 110 $ de l’an un + un autre 10 % = 21 $ de profit.
                133 $ la troisième année, soit 121 $ de l’an deux + un autre 10 % = 33 $ de profit.
                Et ainsi de suite jusqu’au moment ou la bouteille n’a plus de potentiel de valeur ajoutée.

Et c’est au sommelier que revient la tâche de décider à quel moment la bouteille cessera de prendre de la valeur et qu’elle devra être vendue.

Vins de consommation courante

Pour les vins de consommation courante, l’idée est complètement inversée. Dans ce cas, le sommelier cherchera toujours à garder le moins de vins en cave. Soit que ces vins n’auront aucun potentiel de s’améliorer avec le temps, soit que les mêmes vins pourront être achetés à un bon prix dans le futur. En fait, il s’agit de vins qui auront un taux d’appréciation (Plus Value) égal à zéro ou inférieur au taux de rendement espéré des propriétaires.

 B)           Taux de roulement

Le taux de roulement des stocks (ou taux de rotation) représente le nombre de fois que vos stocks doivent être renouvelés dans un période donnée pour répondre à la demande de vos clients. Plus vos stocks seront élevés et plus bas sera le taux de rotation. C’est donc dire que plus le taux de rotation est bas, plus vos stocks stagnent… et il en va de l’investissement qui ne rapporte rien à ses investisseurs.

Par exemple, il vaut mieux posséder une quantité de 1 000 bouteilles qui se vendent toutes les semaines (taux de rotation de 52 par année) qu'une quantité de 10 000 bouteilles qui se vendent en 10 semaines (taux de rotation de 5.2 annuellement). En effet, dans le premier cas, si la valeur moyenne des flacons est de 20 $, l’investissement représentera 20 000 $. Alors que, dans le deuxième cas, l’investissement totalisera 200 000 $. Et les deux caves généreront les mêmes revenus… Le rendement sur l’investissement serait donc 10 fois moins élevé avec un taux de 5.2.

Pour calculer le taux de roulement, vous devez procéder en deux étapes :

1. Vous devez calculer le stock moyen que vous avez gardé en réserve durant la période : (stock du début + stock de fin) ÷2. En tenant compte des parenthèses.

Exemple :
si votre stock du début de période représente 20 000 $ et que votre stock de fin de période totalise 22 000 $, alors votre stock moyen sera de (20 000 $+ 22 000 $) ÷ 2 = 21 000 $

2. Vous devez calculer le taux de rotation des stocks : Achat en quantité ou en valeur ÷[(stock du début + stock de fin) ÷2]. également en quantité ou en valeur.

Exemple :
disons que vous avez acheté pour 105 000 $ pendant l’année : 105 000 $
 ÷ 21 000 $ = 5 de taux de roulement.

Quantité optimale de stocks

Il n’existe pas de règle fixe pour déterminer la quantité optimale de stocks, mais il est préférable qu’elle soit au minimum, compte tenu de l’importance des sommes que l’on doit généralement y immobiliser. Pour déterminer une quantité de stock acceptable, il faut tenir compte de facteurs comme le délai de livraison, l’espace d’entreposage disponible, le coût d’occupation de l’espace d’entreposage, les coûts de manutention, la capacité des vins à supporter l’entreposage, etc. Surtout, il faudra se référer à ses statistiques des années antérieures pour s’assurer de répondre à la demande prévue.

L’objectif de tout bon sommelier consiste à maintenir un taux de roulement élevé en tentant de baisser au minimum  sa quantité des stocks de vins de consommation, car garder de grandes quantités en stock coûte très cher.

Concrètement, il est intéressant d'avoir une carte des vins bien remplie, mais si les produits ne tournent pas, cela peut devenir très rapidement un fardeau financier insupportable.

4.2          La valeur d’une cave à vin

Une cave à vin ne s’évalue pas de la même façon que les autres actifs d’un restaurant.

D’un point de vue comptable, la cave à vin de garde ne prend aucune valeur tant et aussi longtemps que la vente finale n’aura pas eu lieu. La valeur de votre cave de garde sur vos états financiers représentera la somme des coûts d’acquisition pour chacune des bouteilles entreposées. C’est donc dire qu’aucun impôt ne sera perceptible tant et aussi longtemps que vous gardez vos bouteilles en cave. Votre Château Mouton payé 100 $ il y a 20 ans ne vous coute rien en impôt même s’il vaut maintenant 2 000 $. Mais lorsque vous le vendrez, vous devrez payer de l’impôt sur le profit de 1 900 $. Votre comptable devra d’ailleurs être avisé que vous avez vendu cette bouteille, car il devra la déduire de vos immobilisations (les stocks de garde) sur votre état financier à la fin de l’année. D’où l’importance de garder un inventaire à jour de votre cave.

D’un point de vue pratique, la valeur de votre cave de vieillissement évolue. Il est important pour le sommelier de surveiller l’évolution du prix de ces stocks sur les marchés. La valeur du marché peut en effet guider les propriétaires qui désirent éventuellement vendre leur fond de commerce. Mais l’évolution de la valeur sur le marché indique également au sommelier si la bouteille doit être conservée ou si elle doit être mise en vente prochainement, ou encore liquidée avant qu’elle ne perde toute sa valeur. Pour suivre l’évolution des prix sur le marché du vin, le sommelier doit surveiller la concurrence, les revues spécialisées et les sites internet qui traitent de ce sujet.

 4.3         Assurances

Le vin est un bien comme un autre au point de vue des assurances et il fait partie de ce que les assureurs nomment «le contenu». Dans une résidence privée aussi bien que dans un restaurant, il faut s’assurer que «le contenu» sur une police d’assurance est suffisant pour couvrir les articles divers comme les ustensiles, le mobilier, la papeterie… et le vin.

Pour éviter toute ambigüité, il est préférable de faire indiquer sur sa police d’assurance que vous possédez une cave à vin d’un nombre X de bouteilles. Il est également préférable d’en tenir un inventaire détaillé et des photos aident toujours à bien documenter un dossier de réclamation.

Dans le cas d’un sinistre comme le feu, l’inondation ou le vol, il sera facile de prouver le dommage. Dans des cas où le sinistre n’affecte que la cave à vin, il faudra probablement demander à un expert sommelier en évaluation d’expliquer aux assureurs la nature et les conséquences du sinistre. Par exemple, un système de climatisation déficient qui a fait geler les stocks… ou, à l’inverse, qui a fait surchauffer les bouteilles.

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